Le club Haägen-Dazs, la carte fidélité qui se moque de ses adhérents

 

D'ordinaire, quand une marque cherche à voir revenir souvent sa clientèle, elle lance un programme de fidélité. En général, on vous court littéralement derrière pour que vous souscriviez à ce programme. Dans la plupart des cas, on vous délivre même la carte dans la foulée, tellement on a peur que vous changiez d'avis. Le système est savamment calculé pour que cela motive suffisamment le client à revenir souvent, sans toutefois ruiner la marque en cadeaux.

Haägen-Dazs, quand ils ne meublent pas les pauses pubs de nos avant-séances de ciné avec des pubs montrant des top-models faisant semblant de déguster langoureusement des pots de glace de 40 litres, possède également une chaîne de glaciers. Dont le réel intérêt ne réside pas dans le choix des parfums, qui confine au ridicule quand, comme moi, on ne supporte que les sorbets. Ni dans les tarifs, relativement prohibitifs. Mais dans le fait qu'ils proposent cette merveille invention culinaire qu'est le topping chocolat (encore appelé touche gourmande), et dont je croyais jusqu'ici que seule la Martinière était le dépositaire.

Au lancement du programme de fidélité (ça remonte à 2001-2002), pourtant, ça partait plutôt bien. J'y avais souscrit à l'époque où le glacier Haägen-Dazs de Juan les Pins sur trouvait encore boulevard de la Pinède (ou pas loin) et qu'il était tenu par une dame tout à fait charmante, tellement habituée à mes commandes que du plus loin qu'elle me voyait, elle plongeait déjà la cuillière dans le bac de sorbet framboise.

A l'époque, il ne fallait pas trop longtemps pour atteindre le montant de points nécessaire pour avoir une consommation gratuite. En plus, Haägen-Dazs envoyait un bon cadeau à l'occasion de l'anniversaire de l'adhérent, ainsi qu'à chaque sortie d'un nouveau parfum. C'était sympa.

Puis je suis repartie à Nantes (pas de Haägen-Dazs là-bas… ils avaient bien tenté d'en faire vivre un près puis dans le Gaumont, mais visiblement l'expérience n'avait pas été concluante), puis au Mans (rien non plus), le seul glacier de la région était à Angers, ils faisaient un peu la gueule quand ils devaient honorer le bon cadeau anniversaire, mais bon…

Là où ça commencé à se compliquer, c'est le jour où j'ai voulu acheter une glace au Haägen-Dazs de Nice (celui de la place Magenta). Ils ont refusé la carte fidélité en prétendant qu'ils ne faisaient plus partie du programme. Idem pour Cannes. Quant à Juan-les-Pins, ils avaient déménagé sur le front de mer. La gentille dame avait été remplacée par des jeunes serveurs grincheux qui viraient impitoyablement quiconque aurait la présomption de vouloir consommer leurs glace en cornet. Sauf que le mec qui me fera manger une glace dans une coupe c'est pas encore né. Et bien sûr, quand je leur ai présenté le bon cadeau envoyé par Haägen-Dazs pour excuser la conduite du glacier de Nice, ils m'ont envoyé me faire voir.

Nouvelle lettre à Haägen-Dazs, nouvelles excuses de la part du siège social, nouveau bon inutile…

Invitation Haagen Dazs

En 2010, bonne nouvelle : un glacier Haägen-Dazs s'ouvre à Nantes. Je m'y rends pleine d'espoir, le serveur m'explique qu'il existe désormais un nouveau programme de fidélité, donc une nouvelle carte, qu'il suffit de remplir un petit formulaire et d'y joindre mon ancienne carte, et qu'il se chargera d'expédier le tout afin que je reçoive ma nouvelle carte dans un délai de 45 jours maximum. Le tout en m'apportant ma glace en cornet renversée dans une bête assiette, sacrilège !

Visiblement, ce serveur n'était pas seulement incapable de comprendre correctement une commande. Il était également infichu de renvoyer un formulaire, puisu'au bout de 2 mois, ne voyant rien venir, il a encore fallu prendre ma plume (numériquement parlant…) pour demander où en était l'envoi de ma nouvelle carte. Étonnement de la part de Haägen-Dazs à qui le formulaire n'était jamais parvenu, et qui me promet une carte dans un délai de 45 jours (refrain connu). Encore 2 mois plus tard, toujours pas de carte. Je me fends d'un nouveau mail, Haägen-Dazs promet un envoi rapide. Et effectivement, un mois plus tard, je reçois… 2 cartes de numéro différent, à une semaine d'intervalle !

Et allez hop, un coup de fil pour leur demander ce qu'ils ont encore fabriqué, et laquelle des cartes est la bonne. On va enfin pouvoir commencer à cumuler. Que je crois… Déjà, le Haägen-Dazs de Nantes a des horaires plutôt bizarres, pas vraiment compatibles avec mon emploi du temps. Ensuite, le patron, qui visiblement n'est pas tombé dans la potion magique d'amabilité étant petit, commence à faire des difficultés pour me servir la glace que j'ai l'habitude de consommer depuis plus de 15 ans. Soit-disant pour des raisons d'hygiène, les glaciers Haägen-Dazs ne seraient plus autorisés à délivrer des glaces en cornet avec topping chocolat. Mais comme on n'a pas non plus le droit de les consommer à l'intérieur du glacier (ou alors renversé dans une assiette, ce qui leur permet de diminuer la moitié la quantité de topping, fallait y penser !)… cela veut dire qu'en gros je suis condamnée à ne plus manger de glaces de ma vie. J'ai toujours eu du mal à admettre les règlements débiles et illogiques. Surtout de la part d'un simple commerçant. Et encore plus quand il est désagréable. Donc, je quitte le glacier en me promettant bien de ne plus y remettre les pieds.

En novembre, bonne nouvelle, un 2e glacier s'ouvre à Nantes (enfin, à Saint-Herblain Atlantis) ! Cela tombe bien, j'ai suffisamment de points sur ma carte pour une consommation gratuite, en plus d'un bon anniversaire et d'un autre bon pour découvrir leur nouveau parfum Mint leaves and chocolate.

Rendu prudente par mes multiples aventures précédentes, je les appelle. Je tombe directement sur leur messagerie. Pour un glacier déjà ouvert depuis une semaine, ça commence bien. Allez, ils doivent sans doutent tellement crouler sous la clientèle qu'ils n'ont même pas le temps de décrocher. J'appelle alors le numéro vert mentionné sur un des bons (0 800 33 32 31). Au bout du fil, un jeune homme plein de bonne volonté mais dont le centre d'appel ne fait probablement par que travailler pour Haägen-Dazs, car il faut patiemment tout lui expliquer. Il me certifie que le nouveau glacier de St Herblain adhère au programme de fidélité de la marque. J'en profite pour lui glisser que le glacier de Nantes fait preuve d'une attitude plutôt surprenante quand il s'agit de servir des toppings chocolat… Mon interlocuteur me fait ré-expliquer le problème à plusieurs reprises, et me demande quel jour et à quelle heure s'est produit l'incident, et de me donner le nom de la personne impliquée. Comme si je prenais des notes ! 🙂

Je me tape 30 min de tram en toute confiance pour aller enfin déguster ma première glace depuis 4 mois. Le nouveau glacier, qui est pourtant ouvert depuis une semaine, n'a pas le moindre client. 2 serveurs bâillent aux corneilles derrière leur comptoir tandis qu'un 3e larron, sans doute un commercial, portant un blouson de la marque, ne semble guère plus overbooké. J'arrive, me présente, l'individu s'empare de ma carte et la passe dans le lecteur à plusieurs reprises, et me la rend négligemment en me disant qu'il va falloir repasser la semaine prochaine car cela ne fonctionne toujours pas. L'ennui, c'est que l'offre sur le bon expire le jour même, et que je me vois mal passer à nouveau la moitié de l'après-midi pour traverser la ville rien que pour une glace. Je leur demande alors pourquoi le matin même on m'a certifié qu'ils prenaient bien la carte Haägen-Dazs. Le commercial hausse dédaigneusement les épaules et me répond quelque chose qui me fait comprendre qu'il ne tient pas la hotline Haägen-Dazs en très haute estime. Et quand je lui demande pourquoi le glacier ne répond pas quand on les appelle au téléphone, il me jette qu'ils n'ont jamais eu de numéro. Là, un des serveurs bafouille timidement qu'en fait si, y a bien la livebox… Excédée, je tourne les talons et plante là ce ramassis d'abrutis, me promettant qu'on ne m'y prendrait plus.

Une semaine plus tard, nouvelle lettre d'excuses de Haägen-Dazs  (qui n'est même pas fichu d'orthographier correctement mon patronyme, mais bon…) :

(…) Nous faisons suite à votre visite dans notre boutique de Nantes.

Nous portons une attention toute particulière à l'hygiène, à la qualité de nos produits et de notre service, il est donc très important pour nous de connaître les remarques que peuvent formuler nos clients.

Vos remarques ont été transmises à la direction de cette boutique Haägen-Dazs. Nous en avons fait part également à notre Directeur Régional afin que celles-ci soient prises en compte et que cela ne se reproduise plus.

Nous vous remercions d'avoir pris le temps de nous faire part de vos remarques (…)

 

Bref, on se demande vraiment à quoi cela sert à Haägen-Dazs de claquer des millions dans des campagnes de pub haut de gamme (sans compter leur joli site en Flash) pour laisser les glaciers dépositaires de leur marque s'amuser ainsi à décrédibiliser la marque. C'est encore plus énervant quand un programme de fidélité vous promet de recevoir un traitement privilégié, alors qu'en réalité, c'est tout le contraire.

L'année prochaine, je m'achète un bac de sorbet à la Fraiseraie, du chocolat à dessert, je mon topping, je me le ferai chez moi bien peinarde.

 

 

Edit du 03/06/2013 : je reçois un courrier m'annonçant la fin du programme de fidélité. C'était relativement prévisible, vu le peu d'intérêt que les glaciers y consacraient. A compter du 17 mai 2013, les achats de produits dans les boutiques adhérentes ne seront plus comptabilisées. Les points doivent être utilisés avant le 31 juillet.

40 points : une boule + une touche gourmande

70 points : deux boules + deux touches gourmandes

90 points : trois boules + trois touches gourmandes

Karine SANCHE

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